Les travaux SOLAS France passés (2006-2007)

Ils ont été soutenus par l'INSU (LEFE dont LEFE-CYBER qui a pris la suite de PROOF), l'ANR, l'IPEV et le CNRS et les Universités auxquelles appartiennent les laboratoires impliqués.

BOA (ANR)

Responsables Géraldine Sarthou (geraldine.sarthou@univ-brest.fr)), Karine Desboeufs (desboeufs@lisa.univ-paris12.fr)

Le rôle clef du fer dans le cycle biogéochimique du carbone et de l'azote dans l'océan a été mis en évidence au cours de la dernière décennie. En ce début de XXIème siècle, pour mieux contraindre nos prévisions sur la réponse de l'océan au changement climatique, un des enjeux majeurs est d'améliorer notre connaissance de la biogéochimie du fer à l'interface Océan/Atmosphère afin de comprendre et de quantifier les interactions entre le cycle atmosphérique du fer, la chimie du fer dans l'océan et le réseau trophique.

L'objectif de BOA est de décrire le cycle biogéochimique du fer de façon particulièrement complète et innovante. D'une part sa chimie est étudiée et quantifiée dans tous ses aspects atmosphériques et océanographiques (spéciation redox, organique et physique), d'autre part les interactions (biodisponibilité/régénération) avec l'ensemble du réseau trophique (du virus au zooplancton) sont prises en considération. Grâce à une double approche expérimentale et modélisatrice, nous sommes capables de mener à bien:



KEPHREN (IPEV, LEFE)

Responsable François Dulac (francois.dulac@lisa.univ-paris12.fr).

La campagne d'été (28j) KEPHREN s'est effectuée en parallèle à la campagne océanographique KEOPS. En parallèle à l'échantillonnage des aérosols à bord du Marion Dufresne que nous avons mis en place, nous avons collecté des aérosols et des retombées atmosphériques sur deux sites de la Péninsule Courbet à Kerguelen: un site supposé non soumis à des perturbations locales situé en altitude (env 280 m) au NE de la base de Port-Aux-Français (PaF), et un site près de la côte sous le vent du désert de Pointe Morne qui est une zone d'émission intense de poussières éoliennes.

Nous avons pu obtenir des résultats sur la composition chimique des flux de dépôt et d'émission qui se produisent dans la région qui montrent que la contribution du désert de pointe Morne n'est pas très important si on le compare aux apports par remontée d'eau profonde. Nous n'avons pas fini d'exploiter les résultats relatifs aux flux de dépôt hors du désert.

Dans le désert nous avons également installé des instruments de mesures des flux d'érosion (station météo, pièges à sables, saltiphone, témoins d'érosion) en collaboration avec le programme BIOSOL, pour quantifier l'érosion éolienne locale.

A PaF (bâtiment B1 le plus au vent de la base), quelques pluies individuelles ont été collectées et immédiatement filtrées et des mesures additionnelles de traceurs atmosphériques (ozone et radon) ont été effectuées. Les analyses chimiques des retombées ne sont pas encore achevées, mais nous n'avons pas détecté de radon au cours de nos mesures. Nous avons aussi réalisé des comptages de particules par classe de taille et des mesures d'épaisseur optique atmosphérique pendant la campagne à l'aide d'appareils portables. Ces résultats sont en cours d'explotation.



BIOSOPE (PROOF, LEFE-CYBER)

Responsable Hervé Claustre (claustre@obs-vlfr.fr)

Avant propos: Le projet BIOSOPE a été soutenu par le programme PROOF à partir de 2001. Le point d'orgue du projet a été la réalisation de la campagne (Octobre-Décembre 2004). Actuellement le projet est dans sa phase d'exploitation et de valorisation avec notamment pour objectif de publier un numéro spécial dans la revue biogeosciences au premier semestre 2007.

Résumé des résultats

On peut résumer les résultats de la campagne BIOSOPE selon trois grandes catégories d'études.

1. Optique / Bio-optique : Les eaux les plus claires de la planète ont été décrites dans le gyre. Les mesures d'éclairement sous-marin dans le visible confirment ce qui était pressenti : les eaux du gyre sont les plus claires de la planète. Ainsi, dans la zone la plus transparente du gyre, aux alentours de l'île de Pâques, la limite de la couche euphotique se situe vers 175 m. Ce sont là des conditions de transparence remarquable qui, en retour, nous renseignent sur l'extrême pauvreté en substances optiquement significatives, c'est-à-dire les particules (phytoplancton, hétérotrophes, bio-détritus) ainsi que les substances organiques dissoutes colorées. Les mesures d'éclairement montrent également la très forte pénétration des UV. Le coefficient d'atténuation diffuse dans ce domaine spectral présente des valeurs parfois égales ou même légèrement inférieures à celles publiées pour le coefficient d'absorption de l'eau pure. Enfin, les analyses de pigments montrent que l'accord entre concentration in situ de Chlorophylle de surface et concentrations télédétectées (SeaWiFS) sont tout à fait concordantes dans le gyre (~ 0.02 mg Chla m-3) et également sur l'ensemble des systèmes étudiés pendant BIOSOPE. Ceci signifie que les algorithmes bio-optiques, qui avaient été initialement extrapolés aux faibles concentrations de chlorophylle (par manque de mesures de référence), restent tout à fait pertinents dans ces gammes de concentration.

2. Bio-géochimie : Le centre du gyre présente des particularité bio-géochimiques uniques. Les concentrations en fer sont extrêmement faibles : entre 100-150 pM dans la couche 0-400m, profondeur en deçà de laquelle se situe la ferricline. De même, les nitrates sont indétectables (< 5 nM) jusqu'à 170- 180m , profondeur où commence la nitracline. Les phosphates ne sont quant à eux jamais limitants, les concentrations de surface étant toujours supérieures à 100 nM. Il est d'ailleurs relativement aisé, sur la base de ces mesures, de reconstituer le scénario (initialement pressenti) du fonctionnement biogéochimique du gyre. L'absence d'apport de fer par voie éolienne (les prélèvements d'aérosols durant la campagne le confirment), par advection, et par diffusion est à l'origine de l'extrême pauvreté des eaux superficielles. En conséquence, la fixation d'azote atmosphérique est inexistante (confirmé par les premières mesures). Les nitrates, seule source d'azote, sont totalement consommés laissant une quantité non négligeable de phosphates non-consommés. Ce système limité exporte a priori extrêmement peu (mais les mesures de déséquilibre isotopique et de flux particulaire méritent encore d'être analysées et réconciliées) les concentrations en particules supérieures à 200 m en dessous de la zone euphotique (mesures PVM) représentent les plus faibles jamais mesurées.

3. Bio-diversité L'environnement nutritif et lumineux qui prévaut au centre du tourbillon conduit à des adaptations particulières. L'extrême pénétration des rayonnements ultra-violets ainsi que les carences en éléments nutritifs déterminent des niches écologiques particulières où des organismes autotrophes et hétérotrophes ont pu s'adapter. Les prélèvements pour les analyses moléculaires ainsi que les isolements de groupes de phytoplancton (procaryotes et eukaryotes, 400 isolats de BIOSOPE en culture à ce jour) permettront de révéler ces éventuelles adaptations taxinomiques et fonctionnelles. Sur la base des observations optiques et biogéochimiques, un certain nombre de pistes sont désormais explorées (la biologie moléculaire, à l'heure actuelle ne permet pas d'obtenir des résultats « aussi vite » que les autres approches:

L'hypothèse de bactéries photo-hétérotrophes (bactéries à bactériochlorophylle ou bactéries à proteorhodospsine), actuellement retenue, devra être confirmée par les mesures moléculaires. Au delà de cette confirmation, les implications biogéochimiques seraient fondamentales car cela signifierait que des processus photoheterotrophes, non pris en compte actuellement pourraient expliquer le déséquilibre apparent (et surtout paradoxal) du bilan métabolique des gyres souvent considérés comme "net hétérotrophes".



GRADIENTS BIOGEOCHIMIQUES en SUBSURFACE (LEFE-CYBER)

Responsable Yves Dandonneau (yd@lodyc.jussieu.fr).

Des résultats récents suggèrent qu'une vie adaptée aux premières dizaines de centimètres de l'océan s'y développe, alimentée par un flux ascendant de particules organiques, et ignorée par les pratiques courantes de prélèvement mises en oeuvre par les océanographes. Une telle adaptation a pour corollaire une résistance à la subduction, et donc, une concentration dans les zones où le courant de surface converge (zones frontales en particulier). Il en résulterait une grande inhomogénéité de la répartition de la nourriture des prédateurs supérieurs, ainsi qu'une variabilité de la couleur de la mer qui ne serait pas due à son contenu en chlorophylle puisque cette biomasse de surface est composée majoritairement de matériel hétérotrophe non chlorophyllien. En outre, comme cela a été suggéré, une respiration sous la surface plus élevée que la photosynthèse pourrait y entraîner une augmentation de la pression partielle de gaz carbonique et par là, diminuer les estimations du puits océanique de ce gaz basées sur la différence des pressions partielles à l'interface.

De façon à étudier à la fois la distribution verticale de cette biomasse juste sous la surface, et sa distribution horizontale sous l'action des divergences et des convergences de la circulation superficielle, nous proposons de réaliser un dispositif de prélèvement simple, muni de prises d'eau à -5, -20 et -50 cm, et qui puisse opérer lorsque le navire est en route sur de longs trajets. Ce dispositif sera testé sur des campagnes océanographiques ou des transits dans le Pacifique tropical sud ouest et des données bio-optiques seront recueillies, permettant notamment de quantifier et caractériser le carbone en particules. Des mesures de pression partielle de gaz carbonique seront également réalisées. En parallèle, le comportement de la matière flottante sera simulé par modélisation méso échelle, et les conséquences sur la variabilité de la couleur de l'océan seront abordées.



KEOPS (PROOF, LEFE-CYBER)

Responsable Stéphane Blain (stephane.blain@com.univ-mrs.fr).

KEOPS (KErguelen Ocean and Plateau compared Study) is a multidisciplinary and international project which, aims to improve our understanding of the response of the Southern Ocean to climate change. Particularly, KEOPS is studying the impact of the natural iron fertilisation on the biological pump of CO2 and on the cycles of other chemical compounds relevant for climate. The campaign took place in January/February 2005 above the Kerguelen Plateau. The results show that substantial differences in key biogeochemical cycles exist above and outside the plateau. This was the case for carbon cycling and particularly carbon export, the relative nitrate and silicic acid utilization and the production of DMS. For all these issues the results of KEOPS differ from findings of artificial iron fertilization experiments in the Southern Ocean and shed new light on the impact of long term iron fertilisation of the Southern Ocean.



ISLAND (LEFE, PNTS): Iron / Sulfur : how iron Limitation Affects the productioN of DMS

Responsable Eva Bucciarelli (bucciare@univ-brest.fr).

Les composés soufrés océaniques diméthylsulfoniopropionate (DMSP), diméthylsulfure (DMS) et diméthylsulfoxyde (DMSO) sont liés via des processus complexes, biologiques (production phytoplanctonique, broutage, activité bactérienne), chimiques (photochimie) et physiques (diffusion du DMS vers l.atmosphère). Dans l'atmosphère, les produits d'oxydation du DMS participent à la formation des nuages (noyau de nucléation). Charlson et al. (1987) postulent ainsi que le DMS influencerait significativement l'albedo et par suite le climat. D'autre part, l'acidité des espèces oxydées du DMS permet une solubilisation importante du fer atmosphérique, augmentant donc les dépôts de fer dissous à la surface océanique (Zhuang et al. 1992). Or le fer est un micronutriment limitant dans plus de 40% de l'océan mondial: ses faibles concentrations contrôlent en partie la production biologique et la structuration de la communauté phytoplanctonique, donc la production de DMSP et DMS (Turner et al. 1996, DiTullio et al. 2001). Cependant, les raisons de la production de ces composés au niveau cellulaire restent spéculatives. Sunda et al. (2002) ont récemment proposé que ce sont des antioxydants. Toute limitation de la croissance, par exemple par le fer, augmente le stress oxydatif et peut induire la production intracellulaire de ces composés soufrés (Sunda et al. 2002, Bucciarelli & Sunda 2003).

Le projet ISLAND propose une étude intégrative sur les interactions limitation par le fer -croissance phytoplanctonique - structure de l.écosystème- production de DMSP, DMS et DMSO au travers des questions suivantes:

Ces études seront menées à la fois par des expériences de laboratoire au LEMAR en collaboration avec le projet BOA (ANR blanc, http://www.univ-brest.fr/IUEM/UMR6539/prog_scientif/boa/boa_uk.htm) et par des expériences de modélisation globale du climat au LSCE/IPSL.

Les résultats des cultures en laboratoire nous permettront de quantifier, en terme de production de DMS/P/O, la réponse à la limitation en fer de trois espèces phytoplanctoniques, représentatives de trois groupes d'importance biogéochimique majeure (coccolithophoridés, diatomées et cyanobactéries). Des expériences de broutage sur ces espèces permettront de mieux comprendre comment les interactions entre phytoplancton, zooplancton et bactéries influencent la répartition des composés soufrés entre DMSP, DMS et DMSO et in fine, quel est leur impact sur la production de DMS. Ces résultats serviront à améliorer un module pronostique du cycle du DMS océanique développé au LSCE/IPSL, et intégré dans le modèle de biogéochimie océanique PISCES. La modélisation permettra d.améliorer les premières estimations de la réponse des émissions de DMS dans le contexte d'une perturbation de l'écosystème phytoplanctonique (ex : fertilisation par le fer).

Ces études s'inscrivent dans le cadre des programmes internationaux comme SOLAS, IMBER et le réseau d'excellence EUROCEANS. Elles répondent également aux objectifs du programme LEFE-CYBER et particulièrement au Thème 4: Processus biologiques et biogéochimiques à l'interface Océan-Atmosphère.



FLAMENCO2 (PROOF, LEFE-CYBER)

Responsable Nicolas Metzl (metzl@ccr.jussieu.fr).



UVECO

Responsable Richard Sempere (sempere@com.univ-mrs.fr).

Son objectif est d'étudier l'impact du rayonnement UV sur les compartiments bactériens et phytoplanctoniques ainsi que sur les transformations photochimiques de la matière organique dissoute.

The UVECO project evaluates the effect of UVR on bacterial and phytoplanktonic communities and on photochemical transformations of dissolved organic matter with a special emphasis in the case of the Mediterranean Sea. Experimental work has been undertaken after coastal seawater collection in the Banyuls/mer Institute and at the Center of Oceanology of Marseille France. In these two institutes, atmospheric UV-R are now continuously monitored whereas UV-R penetration in the coastal Sea are regularly measured and freely available. Our researches also help for a better understanding of UV light in marine biogeochemical cycles. For instance, researchers worked on the acclimation of phycobilisomes of cynaobacterium Synechococcus to high light (Six et al., 2005),or on the heterotrophic bacteria capability top degrade dissolved organic compounds (Abboudi et al., submitted). Furthermore, our work allowed to identify new dissolved organic compounds i.e. dicarboxylic acids which are abundantly produced by UV effects on fatty acids (Tedetti et al., 2006).

Six C., Thomas J.C., Thion L, Lemoine Y., Zal F. and Partensky F. (2005). Two novel phycoerythrin-associated linker proteins in the marine cyanobacterium /Synechococcus/ sp. WH8102. Journal of Bacteriology 187: 1685-1694.

Tedetti M., Kawamura K., Charriere B., Chevalier N. and Sempere R. (2006) Determination of low molecular weight dicarboxylic acids in seawater samples, Analytical Chemistry, 78: 6012-6018